Des manifestants ont pris d’assaut un tribunal en Corée du Sud après la prolongation de la détention de Yoon, rapporte Reuters

Auteurs : Joyce Lee et Yu-min Park

SEOUL (Reuters) – Des centaines de partisans du président sud-coréen Yun Suk-yeol ont pris d’assaut un palais de justice tôt dimanche après la prolongation de sa détention, brisant les fenêtres et saccageant la maison à l’intérieur, une attaque que le dirigeant par intérim du pays a qualifiée d'”impensable”.

Mercredi, Jun est devenu le premier président sud-coréen en exercice à être arrêté alors qu’il fait face à des accusations de sédition liées à sa déclaration étonnante et de courte durée de l’état d’urgence le 3 décembre qui a plongé le pays dans la tourmente politique.

Peu après que le tribunal a annoncé sa décision dimanche vers 3 heures du matin (18h00 GMT), les partisans de Yoon ont inondé le bâtiment, maîtrisant la police anti-émeute qui tentait de les tenir à distance.

Les manifestants ont allumé des extincteurs sur les lignes de police gardant l’entrée principale, puis ont envahi l’intérieur, détruisant le matériel de bureau, les installations et le mobilier, ont montré des images.

La police a rétabli l’ordre quelques heures plus tard, affirmant avoir arrêté 46 manifestants et s’engageant à retrouver les autres personnes impliquées.

“Le gouvernement regrette vivement les violences illégales (…) qui sont impensables dans une société démocratique”, a déclaré le président par intérim Choi Sang-mok dans un communiqué, ajoutant que les autorités renforceraient les mesures de sécurité autour du rassemblement.

Neuf policiers ont été blessés dans le chaos, a rapporté l’agence de presse Yonhap. La police n’était pas immédiatement disponible pour commenter les policiers blessés.

Une quarantaine de personnes ont été légèrement blessées, ont indiqué les services d’urgence près du tribunal du district ouest de Séoul.

Plusieurs des personnes impliquées ont retransmis l’incursion en direct sur YouTube, montrant des manifestants défonçant le tribunal et scandant le nom de Yoon. Certains streamers ont été arrêtés par la police alors qu’ils diffusaient.

L’INQUIÉTÉ ION PEUT DÉTRUIRE LES PREUVES

Alors que Yoon refusait d’être interrogé, les enquêteurs dont le délai pour arrêter le président destitué avait expiré ont demandé vendredi au tribunal de prolonger sa détention.

Après une audience de cinq heures samedi, à laquelle a assisté Jun, le juge a rendu une nouvelle ordonnance de prolongation de la détention jusqu’à 20 jours, en raison de « craintes que le suspect ne détruise des preuves ».

La réglementation sud-coréenne exige qu’un suspect détenu en vertu d’un mandat soit soumis à un examen physique, soit photographié et porte un uniforme de prison.

Le dirigeant est en isolement cellulaire dans un centre de détention à Séoul.

Le Bureau d’enquête sur la corruption des hauts fonctionnaires, qui dirige l’enquête, a déclaré qu’il avait convoqué Yoon pour un interrogatoire plus approfondi dimanche après-midi, mais le procureur devenu président ne s’est pas présenté. Le CIO a déclaré qu’il demanderait à Yoon de venir l’interroger lundi.

Ses avocats soutiennent que l’arrestation était illégale parce que le mandat d’arrêt avait été émis dans la mauvaise juridiction et que l’équipe d’enquête n’avait aucun mandat pour enquêter.

La sédition, le crime pour lequel Yun pourrait être accusé, est l’un des rares pour lesquels le président sud-coréen ne bénéficie pas de l’immunité et est techniquement passible de la peine de mort. Cependant, la Corée du Sud n’a exécuté personne depuis près de 30 ans.

Par l’intermédiaire de ses avocats, Yoon a déclaré au tribunal qu’il avait trouvé l’incident violent “choquant et malheureux”, appelant les gens à exprimer leurs opinions de manière pacifique.

“Le président a dit (…) qu’il n’abandonnerait pas et qu’il corrigerait l’erreur, même si cela prend du temps”, ont indiqué les avocats dans un communiqué. Déclarant comprendre que beaucoup ressentaient « de la colère et de l’injustice », Yoon a demandé à la police d’adopter une « attitude tolérante ».

Indépendamment de l’enquête pénale qui a semé le chaos dimanche, la Cour constitutionnelle réfléchit à l’opportunité de le démettre définitivement de ses fonctions, conformément à la destitution du Parlement le 14 décembre, ou de lui restaurer ses pouvoirs présidentiels.

LES PARTIS POLITIQUES COMPTENT

Le Parti conservateur du pouvoir populaire de juin a qualifié la décision du tribunal de prolonger sa détention dimanche de « grande honte ».

“La question se pose de savoir si les conséquences de la détention de l’actuel président ont été suffisamment prises en compte”, indique le communiqué du parti.

Le principal parti d’opposition, le Parti démocrate, a annoncé que cette décision constituait une “pierre angulaire” pour le rétablissement de l’ordre et que les “émeutes” des groupes “d’extrême droite” ne feraient qu’aggraver la crise nationale.

Le soutien au PPP a chuté après sa déclaration de l’état d’urgence, qu’il a retiré quelques heures plus tard avant un vote unanime au Parlement pour le rejeter.

Mais dans la tourmente qui a suivi – au cours de laquelle le parlement majoritaire d’opposition a également destitué son premier remplaçant et où les enquêteurs ont bâclé une première tentative d’arrestation de Yoon – le soutien au PPP a fortement rebondi.

© Reuter. Un cortège de véhicules censés transporter le président sud-coréen Yoon Suk Yeo arrive au centre de détention de Séoul à Uiwang, en Corée du Sud, le 18 janvier 2025. REUTERS/Kim Soo-hieon

Son parti a devancé le Parti démocrate d’opposition en termes de soutien – 39% contre 36% – pour la première fois depuis août, a montré vendredi un sondage Gallup Corée.

Des milliers de personnes se sont rassemblées dimanche matin pour un rassemblement organisé en soutien à Yoon dans le centre-ville de Séoul. Des manifestations contre Jun ont eu lieu dans toute la ville ces derniers jours.



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